Malgré le recul du gouvernement, la Roumanie toujours en crise





CE QU'IL FAUT SAVOIR - Le pays a connu ses plus grandes manifestations depuis le renversement du régime communiste en 1989. Une partie de la population réclame le départ d'un gouvernement qu'elle estime corrumpu. Le président menace de dissoudre l'Assemblée si le gouvernement ne rétablit la situation.

• L'étincelle

Les manifestations ont débuté en réaction à l'adoption d'un décret, que le gouvernement a pris sans engager de débats devant le Parlement. Le texte prévoyait un seuil de 44.000 euros pour pouvoir être poursuivi en cas d'abus de pouvoir. Or, une partie des Roumains y voient une tentative de la part de l'homme fort de la Roumanie, Liviu Dragnea, chef du Parti social-démocrate (PSD), d'échapper à des poursuites judiciaires. Ce dernier est actuellement jugé pour avoir fait payer le salaire de deux secrétaires du PSD par le conseil départemental, dont il était le président. Or, les sommes en question s'élèvent à 24.000 euros, soit bien en-dessous du seuil fixé par le décret.
Près de 2000 autres politiques roumains sont actuellement mis en examen ou purge une peine de prison pour des faits de corruption, et nombre d'entre eux pourraient bénéficier de la procédure. Selon les études, le sentiment de vivre dans une société corrupu est l'un des plus élevés de l'Union européenne.
• Une semaine de manifestations

Les Roumains ont donc immédiatement réagi face à ce passage en force. Ils étaient quelques milliers à protester juste avant l'adoption du décret dès le dimanche 29 janvier, environ 10.000 le 31, soir de l'adoption du décret. Le lendemain a eu lieu la première démonstration de force: 250.000 personnes ont protesté dans les rues de la capitale, Bucarest, et des grandes villes du pays, réclamant le retrait du décret et la démission du gouvernement. La mobilisation s'est maintenue tous les soirs jusqu'à atteindre le record de 500.000 personnes, dimanche 5 février.

• La réaction du gouvernement

Pendant quelques jours, le gouvernement a tenu bon après la publication de son décret, le justifiant par la nécessité de désengorger les prisons. Pour sa défene, il a également invoqué la mise en conformité le code pénal dont une soixantaine d'articles ont été invalidés par la Cour constitutionnelle.
Face à l'ampleur des manifestations, il cède en partie le samedi, se disant prêt à des concessions. Puis, le dimanche, il décide de le retirer totalement. Cependant, arrivé au pouvoir suite aux élections du 11 décembre, le premier ministre, Sorin Grindeanu refuse de démissionner.

• Poursuite de la contestation

Une semaine après le début du mouvement de contestation, les foules sont loin d'être aussi nombreuses. Mardi soir, on dénombrait 3000 personnes dans les rues de Bucarest réclamant la démission du gouvernement. Ils sont cependant déterminés. Leur message s'affichait sur une banderole de plusieurs dizaines de mètres de long: «Nous respectons le résultat des élections. Nous souhaitons un gouvernement compétent et propre.»

• Le président menace

La crise a pris un nouveau tournant ce mardi avec l'intervention du président de centre droit, Klaus Iohannis. Devant les députés, au cours d'un discours censé être solennel, il a pourtant attaqué le gouvernement: «L'abrogation du décret et un éventuel limogeage du ministre de la Justice ne sont pas suffisants». Les élections ayant eu lieu il y a moins de deux mois, il juge «excessif» de «convoquer des élections législatives pour le moment». Selon lui, la solution se trouve «à l'intérieur» de la majorité de gauche, sous-entendant que le gouvernement devait démissionner. «Vous avez gagné, maintenant gouvernez et légiférez, mais pas n'importe comment. La Roumanie a besoin d'un gouvernement fort, d'un gouvernement qui travaille de manière transparente et prédictible. Si le PSD, qui a créé cette crise, ne la résout pas d'urgence, je vais convoquer les partis politiques pour des consultations, en vertu de mes prérogatives.»

Source:
www.lefigaro.fr