Moody's assène un nouveau coup à l'Espagne

L'agence de notation américaine a dégradé la note de la dette espagnole de trois crans, jugeant le plan d'aide de 100 milliards insoutenable pour la dette du pays. Une nouvelle dégradation est à prévoir d'ici trois mois. En moins d'une semaine, l'Espagne est passée par tous les états. Du soulagement d'avoir obtenu l'aide de l'Europe pour ses banques à la peur. Celle de suivre la même descente aux enfers que connaît actuellement la Grèce. Cette décision est un sérieux coup dur pour Mariano Rajoy et son gouvernement qui s'est toujours refusé à croire que le pays était dans la même situation que la Grèce. En abaissant de trois crans la note de sa dette, Moody's a pourtant clairement montré le contraire. L'Espagne n'est plus qu'à une marche de la catégorie spéculative, selon l'agence de notation. Dans moins de trois mois, le pays pourrait intégrer cette catégorie. Depuis que Rajoy a pris le pouvoir en décembre dernier, la note espagnole a été abaissée de cinq crans. S&P n'a pas changé la note de l'Espagne Il y a six jours, c'est Fitch qui avait abaissé la note de la dette espagnole de trois crans à BBB, soit à deux crans de la catégorie spéculative. En revanche, S&P avait maintenu son BBB+ à l'Espagne considérant que le plan d'aide européen «correspondait à notre estimation des provisions manquantes». De son côté, Moody's considère que ce plan va «accroître encore le poids de la dette supporté par le pays». plan d'aide européen de 100 milliards signé samedi dernier. De plus, Moody's considère que «l'Etat espagnol a un accès très limité aux marchés financiers, comme le montrent le fait qu'il compte sur le FESF et le MES (les mécanismes anticrise de la zone euro) pour ses fonds de recapitalisation et sa dépendance croissance vis-à-vis de ses banques nationales comme acheteurs prioritaires de ses émissions obligataires, lesquelles à leur tour obtiennent leurs financements de la BCE» (Banque centrale européenne). Enfin, «la faiblesse persistante de l'économie espagnole fait de la dégradation de la solidité financière du gouvernement et de sa vulnérabilité croissante à un arrêt soudain des financements, une inquiétude bien plus grave que s'il y avait un espoir raisonnable de croissance économique vigoureuse dans les quelques années à venir», a considéré Moody's. La peur s'installe un peu plus en Espagne.

Les conditions du prêt européen aux banques espagnoles se précisent




Les contours du prêt, pouvant aller jusqu'à 100 milliards d'euros, que la zone euro prépare pour renflouer les banques espagnoles en difficulté se dessinent petit à petit. Selon le journal espagnol ABC - qui ne cite cependant pas de sources -, l'échéance du prêt, "au taux de 3 %", sera de quinze ans, admettant que celle-ci pourrait varier, "mais en aucun cas être inférieure à dix ans".

C'est également ce qu'avait suggéré lundi un porte-parole de la Commission européenne, indiquant que des taux d'intérêt de 3 % ou 4 % seraient "raisonnables" pour les fonds prêtés à l'Espagne. Il s'était cependant montré plus prudent, estimant qu'il était "prématuré de parler de taux d'intérêt" car "cela dépend des conditions de marché".

UN PRÊT, DEUX FONDS

L'Espagne a conclu samedi avec ses partenaires européens un accord sur un plan d'aide pour ses banques, dont certaines sont en grande difficulté en raison de leur exposition au secteur immobilier. Elle doit présenter formellement sa demande d'aide avant le 21 juin.
On ignore d'autre part si l'argent viendra du Fonds de secours de la zone euro ou du Mécanisme européen de stabilité, qui doit entrer en vigueur début juillet. Une "combinaison des deux fonds" n'est pas exclue, a déclaré lundi le commissaire européen aux affaires économiques, Olli Rehn. Le prêt européen sera injecté dans le fonds public espagnol d'aide au secteur bancaire, le FROB, qui ensuite distribuera l'argent aux banques concernées.

TENSION SUR LES TAUX

Les taux à dix ans espagnols se tendaient mardi matin dans un marché qui se remet à douter de l'avenir de la zone euro et s'interroge sur les modalités du plan de sauvetage des banques espagnoles. En milieu de matinée, le rendement espagnol se tendait à 6,59 % contre 6,487 % lundi soir.
Le spread, qui mesure la prime de risque par rapport à l'emprunt européen de référence - le Bund allemand, était alors au-delà de 500 points de base, à 5,25 points de pourcentage, illustrant la méfiance des investisseurs à prêter à l'Espagne et de manière générale aux autres pays fragiles de la zone euro.
Ainsi, même du côté des pays considérés comme sûrs, les taux étaient aussi en légère hausse. Le Bund allemand voyait mardi matin ses taux monter à 1,331 % contre 1,303 %, quand ceux de la France s'affichaient à 2,597 % contre 2,55 %.

Source: www.lemonde.fr