Que révèle l'agression de Silvio Berlusconi?


Un psychiatre et un psychanalyste ont répondu aux questions de LEXPRESS.fr au sujet de l'agression de Silvio Berlusconi et de ce qu'elle révèle.
Ce qu'on peut dire de l'agresseur et de son acte
Pour Roland Gori, psychanalyste, si l'agresseur de Silvio Berlusconi est effectivement un individu atteint de troubles psychiques graves. "On peut être alors dans une logique de rêve éveillé. L'agresseur accroche au nom ou à la figure de la personne dans son propre scénario." Roland Coutanceau, psychiatre et criminologue, précise que ce type d'agression est "beaucoup plus propice à un déséquilibré qu'à un fou, qui a son délire propre."
Cependant, "on ne peut rien dire de vrai sans la parole de cette personne", nuance Roland Gori. Les deux professionnels se refusent à émettre davantage que des hypothèses. Car, pour Roland Coutanceau, "seule l'évaluation de la part d'experts et le récit de cet individu pourra expliquer ses motivations et le pourquoi de son geste.".
L'incidence du climat social sur ce type d'actes?
"L'acte peut n'avoir aucun rapport avec le climat socio-politique, notamment si la logique de l'agresseur s'inscrit dans une logique délirante. Mais certains malades mentaux sont sensibles à des climats latents de violence et de tensions." "Lorsqu'il y a un parfum un peu flottant de violence et de tensions, cela peut aimanter un passage à l'acte. Comme lorsqu'il y a un climat de chasse à l'homme." explique Roland Coutanceau.
Pourquoi Berlusconi?
"Les personnalités politiques sont les crieurs publics que chacun a sur sa scène. Berlusconi est quelqu'un qui a pour habitude de s'exhiber et de tenir des propos obscènes (au sens étymologique)" explique Roland Gori. "Cet acte est peut-être révélateur d'un désespoir politique. Cela arrive lorsqu'il n'y a plus de relais politiques pour exprimer une opposition ou un désespoir."
Mais selon Roland Coutanceau, "ce n'est pas l'apanage de Berlusconi, toutes les personnalités politiques sont des catalyseurs pour des personnalités aussi troubles."
On se souvient de Richard Durn et de la tuerie lors d'une séance du conseil municipal de Nanterre en 2002. De même, Maxime Brunerie et sa tentative d'assassinat sur Jacques Chirac en 2002 avec une carabine. Ainsi que Le coup de couteau dont fut victime Bertrand Delanoë en 2002 lors de la Nuit blanche, etc.
Ce qui est frappant dans cet acte
Pourquoi a-t-il visé la bouche? Que ne pouvait-il plus entendre?
Pour Roland Gori, deux détails sont particulièrement troublants: "Le fait qu'il l'ait frappé au niveau de la bouche. Qu'est-ce qu'il ne pouvait plus entendre? Il a très bien pu frapper au hasard, mais la question se pose, pourquoi la bouche?"
Deuxième chose, "le choix d'une statuette, pourquoi? Y a-t-il une valeur symbolique ou était-ce tout simplement le plus pratique?" L'agresseur a en effet utilisé une reproduction miniature de la cathédrale de Milan, l'un des symboles architecturaux de la ville où Berlusconi était venu assurer un meeting.
Peut-il y avoir une volonté d'imitation?
"On ne peut pas exclure une imitation. Surtout aujourd'hui que les faits divers sont le pain quotidien du journalisme. Mais ce n'est pas automatique, bien heureusement." répond Roland Gori. On pense tout de suite à l'agression dont à été victime le professeur Delajoux, le médecin qui a opéré Johnny Hallyday. "On peut imaginer que ça découle du même procédé."
Quant à l'agresseur, ils le répètent, "on ne saura rien tant que celui-ci ne s'explique ni ne se raconte."

Source: www.lexpress.fr