Un million de manifestants anti-avortement défilent à Madrid


Ils protestaient samedi contre le projet de libéralisation de l'avortement proposé par le gouvernement socialiste espagnol. Dimanche, la droite demande le retrait de cette loi.

Plus d'un million de catholiques espagnols soutenus par l'Eglise et la droite, ont manifesté samedi à Madrid contre le projet de libéralisation de l'avortement du gouvernement socialiste aux cris de "l'avortement non! la vie oui", selon diverses estimations.

Les organisateurs ont avancé plusieurs estimations de participation à cette marche avant de la fixer définitivement à deux millions de personnes, tandis que la région de Madrid gouvernée par les conservateurs, a avancé le chiffre d'1,2 million de participants.

Le projet de loi socialiste, réformant une loi de 1985 qui n'avait dépénalisé l'avortement que sous certaines conditions, prévoit notamment une liberté totale d'avorter dans un délai de 14 semaines.

La droite demande le retrait de cette loi qui "divise les Espagnols"

Le dirigeant du Parti Populaire espagnol (PP, droite), première formation d'opposition, a annoncé dimanche qu'il demanderait cette semaine le retrait de cette loi. M. Rajoy a indiqué lors d'une conférence de presse qu'il demanderait aux députés, par le biais d'un amendement, que la loi "soit renvoyée au gouvernement et ne passe pas". Pour le chef du parti conservateur, ce projet de réforme "divise les Espagnols".

Le chef du gouvernement espagnol, le socialiste José Luis Rodríguez Zapatero, "devrait cesser de se comporter avec arrogance comme il l'a fait ces derniers temps (...), écouter ce que disent les gens et retirer une loi qui ne sert qu'à diviser l'ensemble des citoyens", a-t-il déclaré. Le PP s'oppose à la réforme et un grand nombre des ses responsables étaient présents à la manifestation

"Lui, il ne peut pas. C'est pour cela que moi, je crie"

Lors de la manifestation, personnes âgées, familles avec enfants et poussettes, groupes d'adolescents dont certains portaient des tee-shirts et des drapeaux rouges sur lesquels était écrit "Droit à la vie", religieuses et curés: une marée humaine a envahi le centre de la capitale espagnole.

La manifestation a débuté à 17H00 derrière une grande pancarte proclamant : "Chaque vie compte" et s'est achevée deux heures plus tard.

La manifestation avait été convoquée par le Forum de la famille, une plateforme d'organisations catholiques conservatrices

"Lui, il ne peut pas, c'est pour cela que moi je crie", scandait un groupe de jeunes filles, en arborant une figurine de plastique représentant un foetus.

Une contestation portée par les organisations catholiques conservatrices

La ministre socialiste de l'Egualité, Bibiana Aido, à l'origine du projet de loi controversé, a exprimé son "respect total" pour les manifestants tout en soulignant que "personne n'a le monopole de la morale". "Aucune femme ne peut être pénalisée pour prendre une décision aussi difficile de celle d'avorter", a-t-elle déclaré.

La manifestation avait été convoquée par le Forum de la famille, une plateforme d'organisations catholiques conservatrices, qui avait fait descendre des centaines de milliers de manifestants dans la rue en 2005 contre la loi autorisant le mariage homosexuel.

L'ancien chef du gouvernement conservateur José Maria Aznar(1996-2004) et plusieurs élus de la droite, dont la présidente de la région de Madrid, Esperanza Aguirre et la secrétaire générale du Parti populaire (PP) Maria Dolores de Cospedal, ont participé à cette marche.

Le projet de loi approuvé le 26 septembre par le gouvernement et qui sera débattu à partir de novembre au Parlement, s'inspire de la législation en vigueur dans la plupart des pays de l'Union européenne.

S'il est adopté en l'état, les femmes vivant en Espagne pourront avorter librement dans un délai de 14 semaines, et de manière exceptionnelle, jusqu'à 22 semaines de grossesse en cas de "risque pour la vie et la santé" de la mère ou "de graves anomalies du foetus".

Une mesure controversée: l'avortement des mineures sans consentement parental

Il ne pourra enfin être pratiqué sans limite de temps qu'en cas de "maladie extrêmement grave et incurable du foetus".

Actuellement, l'avortement n'est autorisé qu'en cas de viol (jusqu'à 12 semaines de grossesse), de malformations du foetus (22 semaines) ou de "danger pour la santé physique ou psychique de la mère" (sans limitation de temps).

Mais dans la pratique, le risque pour la santé psychique de la mère est le motif invoqué par plus de 90% des femmes, ce qui a donné lieu à des avortements très tardifs et controversés.

Le projet contient une disposition très controversée, y compris dans l'électorat de gauche: les mineures de 16 et 17 ans pourront avorter librement sans consentement ni information préalable de leurs parents.

Les Espagnols sont majoritairement opposés à cette disposition, alors qu'ils se divisent en camps à peu près égaux entre partisans et opposants à la réforme dans son ensemble, selon les sondages.